[Text prepared by Ian Johnston, Malaspina University c. 2001. Reformatted in 2020 by George P. Landow].

Dans mon ouvrage sur les Ossmens fossiles, je me suis proposé de reconnaître à quels animaux appartiennent les débris osseux dont les couches superficielles du globe sont remplies. C'était chercher è parcourir une route où l'on n'avait encore hasardé que quelques pas. Antiquaire d'une espèce nouvelle, it me fallut apprendre à la fois à restaurer ces monumens des révolutions passées et à en déchiffrer le sens; j'eus à recueillir et à rapprocher dans leur ordre primitif les fragmens dont ils se composent; à reconstruire les êtres antiques auxquelles ces fragmens appartenaient; à les reproduire avec leurs proportions et leurs caractères; à les comparer enfin à ceux qui vivent aujourd'hui à la surface du globe: art presque inconnu, et qui supposait une science à peine effleurée auparavant, celle des lois qui président aux coexistences des formes des diverses parties dans les êtres organisés. Je dus donc me préparer à ces recherches par des recherches bien plus longues sur les animaux existans; une revue presque générale de la création actuelle pouvail seule donner un caractère de démonstration à mes résultats sur cette création ancienne; mais elle devait en même temps me donner un grand ensemble de règles et de rapports non moins démontrés, et le règne entier des animaux ne pouvait manquer de se trouver en quelque sorte soumis à des lois nouvelles, à l'occasion de cet essai sur une petite partie de la théorie de la terre.

Ainsi, j'étais soutenu dans ce double travail par l'intérêt égal qu'il promettait d'avoir, et pour la science générale de l'anatomie, base essentielle de toutes celles qui traitent des corps organisés, et pour l'histoire physique du globe, ce fondement de la minéralogie, de la géographie, et même, on peut le dire, de l'histoire des hommes, et de tout ce qu'il leur importe le plus de savoir relativement à eux-mêmes.

Si l'on met de l'intérêt à suivre dans l'enfance de notre espèce les traces presque effacées de tant de nations éteintes, comment n'en mettrait-on pas aussi à rechercher dans les ténèbres de l'enfance de la terre les traces de révolutions antérieures à l'existence de toutes les nations? Nous admirons la force par laquelle l'esprit humain a mesuré les mouvemens de globes que la nature semblait avoir soustraits pour jamais à notre vue; le génie et la science ont franchi les limites de l'espace; quelques observations développées par le raisonnement ont dévoilé le mécanisme du monde. N'y aurait-il pas aussi quelque gloire pour l'homme à savoir franchir les limites du temps, et à retrouver, au moyen de quelques observations, l'histoire de ce monde et une succession d'évenmens qui ont précédé la naissance du genre humain? Sans doute les astronomes ont marché plus vite que les naturalistes, et l'époque où se trouve aujourd'hui la théorie de la terre resemble un peu à celle où quelques philosophes croyaient le ciel de pierres de taille et la lune grande comme le Péloponèse; mais, après les Anaxagoras, il est venu des Copernic et des Kepler qui on frayé la route à Newton; et pourquoi l'histoire naturelle n'aurait-elle pas aussi un jour son Newton?


Created 2001

Last modified 15 January 2020