[Text prepared by Ian Johnston, Malaspina University c. 2001. Reformatted in 2020 by George P. Landow].

Mais, ce qu'il est aussi bien important de remarquer, ces irruptions, ces retraites répétées, n'ont point toutes été lentes, ne se sont point toutes faites par degrés; au contraire, la plupart des catastrophes qui les ont amenées ont été subites; et cela est surtout facile à prouver pour la dernière de ces catastrophes; pour celle qui par un double mouvement a inondé et ensuite remis à sec nos continens actuels, ou du moins une grande partie du sol qui les forme aujourd'hui. Elle a laissé encore, dans les pays du Nord, des cadavres de grands quadrupèdes que la glace a saisis, et qui se sont conservés jusqu'à nos jours avec leur peau, leur poil, et leur chair. S'ils n'eussent été gelés aussitôt que tués, la putréfaction les aurait décomposés. Et d'un autre côté, cette gelée éternelle n'occupait pas auparavant les lieux où ils ont été saisis; car ils n'auraient pas pu vivre sous une pareille température. C'est donc le même instant qui a fait périr les animaux, et qui a rendu glacial le pays qu'ils habitaient. Cet événement a été subit, instantané, sans aucune gradation, et ce qui est si clairement démontré pour cette dernière catastrophe ne l'est guère moins pour celles qui l'ont précedée. Les déchiremens, les redressemens, les renversemens des couches plus anciennnes ne laissent pas douter que des causes subites et violentes ne les aient mises en l'état où nous les voyons; et même la force des mouvemens qu'éprove la masse des eaux est encore attestée par les amas de débris et de cailloux roulés qui s'interposent en beaucoup d'endroits entre les couches solides. La vie a donc souvent été troublée sur cette terre par des événemens effroyables. Des êtres vivans sans nombre ont été victimes de ces catastrophes; les uns habitans de la terre sèche se sont vus engloutis par des déluges; les autres, qui peuplaient le sein des eaux, ont été mis à sec avec le fond des mers subitement relevé; leurs races mêmes ont fini pour jamais, et ne laissent dans le monde que quelques débris à peine reconnaissables pour le naturaliste.

Telles sont les conséquences où conduisent nécessairement les objets que nous rencontrons à chaque pas, que nous pouvons vérifier à chaque instant dans presque tous les pays. Ces grands et terribles événemens sont clairement empreints partout pour l'oeil qui sait en lire l'histoire dans leurs monumens.

Mais ce qui étonne davantage encore et ce qui n'est pas moins certain, c'est que la vie n'a pas toujours existé sur le globe, et qu'il est facile à l'observateur de reconnaître le point où elle a commencé à déposer ses produits.


Created 2001

Last modified 15 January 2020